Lors d’une conférence du lobby juif tenue vendredi dernier au Club national de la presse à Washington, Roger Waters, un musicien de rock anglais, auteur-compositeur-interprète, a lu des lettres aux musiciens les exhortant à ne pas jouer en Israël conformément à l’appel de la campagne BDS.
Le musicien Waters a noté qu’Israël verse des « pots-de-vin » aux musiciens pour donner des spectacles musicaux en Israël, en disant : « Les Israéliens paient excessivement bien les musiciens itinérants… Se produire en Israël est un concert lucratif, mais cela sert à normaliser l’occupation, l’apartheid, le nettoyage ethnique, l’incarcération des enfants, le massacre de routine de manifestants non armés, toutes ces mauvaises choses. »
Voici une partie d’une lettre que Waters a écrite à Madonna et à d’autres en 2019 pour s’opposer à leur choix de participer au concours Eurovision en Israël. Il les implore :
« Se concentrer à sympathiser avec leurs frères et sœurs palestiniens. Essayez de se mettre à cet endroit. Essayez d’imaginer 70 ans, génération après génération, se réveillant chaque matin, jour après jour, heure après heure, devant le pillage systématique de la vie de votre peuple. »
Lentement, lentement – chaque ville, chaque village, chaque maison, chaque olivier, chaque pierre, chaque fleur, chaque sourire, chaque kilomètre fatigué, chaque fille, chaque fils, chaque mémoire transmise, chaque tressaillement d’année en année, chaque tremblement, chaque larme. Chaque main, chaque front plissé – lentement, lentement piétiné.
Et ceux qui ont gardé la tête haute et résisté avec beaucoup de courage, de vaillance et de grâce, nous ont demandé notre aide aux cœurs saignants et aux artistes. Nous, nous avons tous, à mon avis, une obligation morale et humaine absolue en tant qu’êtres humains de répondre à leur appel. »
Voici une partie d’une lettre que Waters a écrite à Lorde, l’artiste néo-zélandais, et à l’activiste palestinienne Ahed Tamimi, après que Lorde ait annulé un concert en Israël en 2017 suite aux appels de la campagne BDS.
On se souviendra de vous, Lorde, pour votre position de principe mesurée en faveur des droits des Palestiniens. Merci d’avoir fait briller ta lumière dans un endroit sombre. Et pour Ahed Tamimi, 16 ans, on se souviendra d’elle parce qu’elle a giflé un soldat lourdement armé, l’un des membres de l’armée qui a brutalement occupé les terres de son peuple au cours des 70 dernières années. Le soldat était allongé contre le mur dans la cour de sa famille, deux jours après qu’un membre de son unité eut tiré dans la tête de son jeune frère non armé avec une balle en caoutchouc. Son frère est dans un coma artificiel. Elle est en prison. Je vous écris à tous les deux avec beaucoup d’admiration.
[Défiguré par cette balle, Mohammed Tamimi, 15 ans, est le cousin d’Ahed]
Nick Cave était provocant quant à sa décision de jouer en Israël en 2018. Waters a déclaré que Cave, « un auteur-compositeur-interprète australien plutôt louche, très aimé des adolescentes du monde entier, m’a accusé, ainsi que Brian Eno, d’être” lâche et honteux » parce que nous soutenons le mouvement BDS.
Pas étonnant qu’il ait évité une conversation avec quelqu’un de BDS avant de continuer ses émissions à Tel Aviv.
Waters a écrit à Cave que son attaque contre BDS avait suscité l’incrédulité, la rage et le chagrin.
Incrédulité. Nick pense qu’il s’agit de censurer sa musique. Quoi, Nick ? Avec tout le respect que je vous dois, votre musique n’a rien à voir avec cette discussion. La mienne aussi, celle de Brian Eno, celle de Beethoven aussi. Ce n’est pas une question de musique, c’est une question de droits de l’homme.
Après l’incrédulité, la rage. Il s’agit d’enfants, comme les jeunes garçons déchiquetés alors qu’ils jouaient au football à Gaza, les garçons assassinés par Israël, les garçons symboliques des milliers et des milliers d’enfants sacrifiés dans la tonte de la pelouse par Israël – la terminologie d’Israël, pas la mienne. Nous, des centaines de milliers d’entre nous, partisans du BDS et des droits de l’homme à travers l’histoire partout dans le monde, nous unissons à la mémoire de Sharpeville, de Wounded Knee, de Lidice, de Budapest, de Ferguson, de Standing Rock et de Gaza, et élevons notre poing en signe de protestation. Nous jetons nos verres au feu de ton insouciance arrogante et brisons nos bracelets sur le rocher de ton implacable indifférence.
Enfin, le chagrin. Et si c’était ta maison démolie, Nick, ton pays envahi, tes villages rasés pour construire des stades pour que les envahisseurs fassent la promotion de concerts pop ? Vos oliviers déracinés, vos enfants morts, sept millions de vos frères et sœurs vivant dans des camps de réfugiés, victimes d’épuration ethnique ? Votre chagrin l’emporterait-il sur votre obsession des inquiétudes concernant la censure de votre musique ?
Roger Waters, est devenu au cours des dernières années l’un des plus éminents défenseurs des droits de l’homme des Palestiniens et du boycott culturel d’Israël.
En juin 2009, Waters s’est prononcé contre le mur qu’Israël a construit sur la terre palestinienne. Plus tard cette année-là, il a promis son soutien à la marche pour la liberté de Gaza. En 2011, Waters a annoncé qu’il avait rejoint le mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) en solidarité avec les Palestiniens. Il a déclaré qu’il était déçu de la politique étrangère britannique envers Israël.
Après des accusations portées par la Ligue anti-diffamation et d’autres organisations de défense d’Israël, Waters a répondu : « Je déplore les politiques du gouvernement israélien dans les territoires occupés et à Gaza. Elles sont immorales, inhumaines et illégales tant que le gouvernement d’Israël poursuit ces politiques. … Il est difficile de faire valoir des arguments pour défendre les politiques du gouvernement israélien, donc les défenseurs potentiels utilisent souvent une tactique de diversion, ils traînent régulièrement le critique dans une arène publique et les accuser d’être antisémites. »
WAFA
